Les musiques écrites, de tradition orale ou d’improvisation appartiennent à l’univers de la prédiction : on les qualifiera de « musiques prédictibles ». A contrario, les productions sonores dues à des systèmes mécaniques, des humains ou des animaux sans coordination consciente seront dénommées « musiques non prédictibles » ou « musiques du chaos ». Dans ce dernier cas, le terme musique pourrait sembler abusif si l’on retenait comme définition de la musique une volonté d’organiser spatialement et temporellement le son. Le « Dictionnaire des Mots de la Musique » de Jacques Siron en propose une définition plus générale : « Art des sons, de leur combinaison et de leur organisation dans le temps ». Ici, la notion d’art est gênante car sensée être le propre de l’humanité. Cette définition mentionne de plus la notion d’organisation. Et que dire lorsque des machines ou des animaux produisent des sons sans organisation consciente à l’instar de certains ensembles instrumentaux ? Tout ceci nous renvoie une fois encore à la difficulté de proposer une définition universelle de la musique. Voilà bien un combat perdu d’avance !
Nous allons ici nous intéresser à des productions sonores pour lesquelles l’aléa s’insinue dans les systèmes organisés. Ces productions se rencontrent à la fois dans les sociétés de traditions orales et les compositions savantes contemporaines occidentales. Nous allons également mettre en parallèle les productions sonores d’origine animale, ainsi que celles issues de la technologie. Nous dénommerons l’ensemble de ces productions sonores : « Musiques du chaos ».
Textes, photos, vidéos © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2011-2024, sauf mention spéciale. Dernière mise à jour : 7 octobre 2024.
SOMMAIRE
Peter Bosch & Simone Simons : Sculptures sonores
. Genèse
. Parcours artistique
. Systèmes chaotiques
. « Was der Wind zum Klingen bringt »
. « Krachtgever »
. « Cantan un Huevo »
. « Aguas Vivas »
. « Último Esfuerzo Rural II »
. À propos de « Último Esfuerzo Rural »
Chaos et sensorialité
Ce soir, du sommet de la colline, je regarde la ville : enchevêtrement de murs, de toitures, d’antennes de télévision, de paraboles, de lumières…
Ce soir, du sommet de la colline, je hume la ville : enchevêtrement d’effluves d’eaux saumâtres depuis longtemps vidangées, de pétro-carburants hâtivement relâchés, d’ordures ménagères abandonnées à la morsure du soleil, de fèces livrés à la curée des mouches, de volutes parfumées de femmes et de fleurs…
Ce soir, du sommet de la colline, j’écoute la ville : enchevêtrement de cris de marchands ambulants et d’enfants, de pétarades de rustiques moteurs à deux temps et de ronronnements de nobles cylindrées, d’aboiements de chiens, de volées de cloches…
Ce soir, des tréfonds de la ville, je scrute le ciel : enchevêtrements galactiques. On dit que les hommes de science prétendent détenir les clés de ce chaos des tréfonds de l’univers, œuvre de Dieu pour les uns, du hasard pour les autres…
Chaos visuels, olfactifs, sonores, fruits de l’activité de la nature sauvage, domestiquée, de la civilisation… Au premier abord, ces enchevêtrements peuvent effrayer, rendent perplexes. En tout cas, ils sollicitent le discernement. S’il est une parcelle de culture méconnue, c’est bien celle de la propension humaine à extraire une information du chaos. Cette capacité relève à la fois de la connaissance (culture) et de la reconnaissance (discernement). Mais avant d’être un acte culturel, elle est éminemment liée à la survie en s'engrammant dans notre cerveau.
Chaos sonore et écoute
Des expériences scientifiques en cours démontrent la difficulté, voire l’incapacité de notre cerveau, à discerner une conversation parmi d’autres de même intensité, difficulté légèrement amoindrie si les autres en question diffèrent par la langue ou si la tessiture est vraiment dissemblable. Qui n’a pas fait l’expérience de suivre une conversation dans un brouhaha en tentant de lire les mots sur les lèvres ?
Points de vue
L’athée et l’agnostique diront que le chaos est fondateur de la vie et de l’équilibre planétaire, là où le croyant percevra la main de Dieu. Et si le chaos n’était que le résultat d’une perception erronée de l’esprit, de notre incapacité à raisonner lorsque le nombre de données tend vers l’infini ? Sur le plan biologique, on pourrait dire que le chaos est généré par une « Intelligence Génératrice de la Vie » (IGV≠IVG !), par la capacité d’adaptation des organismes vivants, par les lois physiques. En un mot, son cadre est l’intelligence. Le chaos sonore n’échappe pas à cette règle. Prenons deux exemples.
Exemple 1 : Dans l’alpage, un berger garde des centaines de brebis dont une partie est munie de sonnailles de diverses hauteurs sonores. Les animaux paissent, marchent, courent, chôment, s’affolent, se dispersent. L’apparent chaos visuel et sonore répond à la plus stricte organisation de cette collectivité composée de brebis jeunes, vieilles, posées, intrépides, saines, malades… À l’aveugle, grâce aux sonnailles, le berger reconnaît les comportements collectifs et individuels, la distance le séparant du troupeau, ses fonctionnements ou dysfonctionnements. Il sait identifier une brebis dans le tumulte de la piétaille bêlante et martelante. Dans ce cas, la culture du berger et sa connaissance du cheptel représentent la clé de sa faculté perceptive. Le même berger, au contact d’un troupeau inconnu de lui ne pourra que reconnaître les mouvements d’ensemble mais pas nommément les individus.
Exemple 2 : Dans le tintamarre produit par les cris des Manchots impériaux, les progénitures parviennent à identifier leurs parents parmi des milliers d’individus à partir de leur signature sonore, un QR code audible en quelque sorte. Ici, nous prenons conscience de notre incapacité perceptive et de notre incompréhension totale du monde des Manchots impériaux.
Le chaos sonore ne répond en rien aux critères du mouvement perpétuel. Même si Paganini a dénommé son œuvre « Mouvement Perpétuel », il s’agit d’une pièce évolutive et non d’une boucle musicale réitérée à l’infini, d’une musique cyclique comme on peut en trouver dans nombre de traditions du monde. Le chaos sonore, à l’instar de ce Mouvement Perpétuel, se caractérise par son changement, infinitésimal peut-être, mais un changement tout de même.
Le chaos sonore a une couleur. La ville et la campagne résonnent différemment selon l’heure de la journée, la pression atmosphérique, la température, l’hygrométrie… Tel chaos sonore possède un timbre, une tonalité agissant sur notre conscient et notre inconscient. Il nous permet de nous situer dans l’espace. Le non-voyant y prend ses repères. Le chaos sonore agit sur notre affect, monopolise notre vigilance ou, au contraire, peut nous conduire vers des états modifiés de conscience.
Perception et culture
Ainsi, la perception du chaos est culturelle : dans la ville, le citadin différenciera ce que le rural ne percevra pas et vice-versa. Plus largement, le chrétien ou le bouddhiste en auront une perception différente. Pour le premier, les notions d’éternité et de stabilité séculaire invitent à une tendance perceptive linéaire tandis que le second, rompu au concept de l’impermanence, il percevra l’instabilité temporelle. Il en est de même pour le monde du vivant en perpétuelle adaptation, l’instant présent différant de l’instant passé.
Dans les sociétés au mode de vie traditionnel, les pratiques instrumentales et chantées relevant de l’aléa s’inscrivent dans un cadre spatio-temporel précis. Les lamentations funèbres, par exemple, ne peuvent être exprimées qu'à des moments édictés par la tradition et en des lieux prévus à cet effet. Il en est de même pour l’appel des muezzins dans la religion musulmane.
Définition
Au regard de ces éléments, voici une proposition de définition pour le chaos sonore : « Enchevêtrement d’éléments sonores autonomes en relations fonctionnelles, sociales, voire légales. »
Cette séquence met en relief la difficulté de perception d’un élément sonore recherché par l’oreille dans un environnement bruyant. Une occasion pour les enseignants de rappeler à leurs étudiants la fragilité de notre oreille souvent malmenée, notamment par les casques audio, les enceintes acoustiques et les instruments puissants joués quotidiennement par les musiciens en herbe. De nombreux articles sont disponibles sur Internet pour développer ce sujet.
Lieu et date : Jaipur, Inde (Rajasthan), Février 2006.
Durée : 01:46. © Patrick Kersalé 2006-2024.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Le musicien rajasthani Akbar Khan chante une chanson de mariage en s’accompagnant d’une vièle kamayacha. Le niveau sonore reste stable tout au long de la séquence.
00:22 - À Jaipur, cette belle façade du Palais des Vents se trouve en pleine ville sur une avenue bruyante. L’illusion de sérénité du départ, où le son ambiant a été coupé, laisse place à un chaos sonore masquant en partie le chant. La musique devient plus ou moins perceptible selon le niveau du chaos urbain.
01:46 - À partir du plan sur le minaret de la mosquée, le niveau sonore de la ville décroît, donnant l’illusion que celui du chant augmente.
Pour illustrer cette forme chaotique, nous avons choisi, les sonnailles des moutons et des chèvres de la tradition du pays de la Crau (Bouches-du-Rhône). Le troupeau appartient au berger Sébastien Bos. Son cheptel est constitué de brebis de race Mérinos et de chèvres du Rove. Les unes et les autres sont ensonnaillées de cloches de diverses hauteurs, formes, alliages, chaque catégorie portant un nom particulier : redoun, clavelas, platelle, pique… Sébastien Bos est un passionné de sonnailles. Son troupeau est l’un des plus « musicaux » de la région. La perception de ce chaos sonore varie selon la distance.
Lieu et date : Parc Naturel Régional du Vercors, Juin 2010.
Durée : 02:20. © Patrick Kersalé 2010-2024.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Au début, moutons et chèvres du Rove présentent tour à tour leurs sonnailles. Les trois premiers animaux portent des redouns (prononcer redon) de hauteurs différentes permettant au berger de les distinguer à l’aveugle.
01:02 - Quelques plans sonores situés à des distances différentes du troupeau (captés avec les mêmes microphones) offrent diverses couleurs sonores. Les prises de son les plus éloignées font penser au tumulte d’un torrent.
Certains peuples du monde pratiquent les lamentations vocales collectives avec une prédominance d’expressions féminines. Elles se pratiquent auprès du cadavre, dans un espace de temps précédant la séparation des vivants d’avec l’enveloppe charnelle, et parfois ultérieurement sous une forme ritualisée propre à chaque communauté.
Aux confins frontaliers du Viêt Nam, du Laos et du Cambodge vivent des peuples pratiquant des lamentations sous la forme “chanté-pleuré”. Chaque communauté les exécute dans un cadre spatio-temporel propre, obligations et interdictions exécutoires étant réglées par la tradition.
Les femmes, majoritairement, se regroupent auprès du cadavre dans la maison où il est exposé ou autour du tombeau dans le cimetière. Elles expriment, noyées dans les sanglots, des paroles de circonstance. Le contenu appartient à chacune, à son histoire, à sa position familiale ou sociale vis-à-vis du défunt. Les textes formulent généralement des regrets, formulent la douleur de la séparation, retracent des tranches de vie partagées avec le défunt.
Au plan technique, le commencement, l’arrêt et le rythme du chant demeurent libres. Toutefois, les hauteurs, bien que diverses, créent un halo sonore d’une certaine homogénéité, chaque chanteuse ajustant au final sa propre hauteur sur la hauteur dominante. La durée des cycles collectifs est déterminée par la tradition, de quelques dizaines de secondes à plusieurs jours. À l’intérieur des cycles collectifs, la durée de participation individuelle dépend de l’implication et de l’énergie physique de chacun. La ligne mélodique est généralement descendante.
Lieux & dates :
. L’appel des Muezzins : Inde, Rajasthan, Jodhpur. Février 2006.
. Lecture des textes bouddhiques : Myanmar, Lac Inlé. Déc. 2005.
. Polyphonie aléatoire des Hmong : Viêt Nam, vill. de Ze Phin, Nov. 2005.
. Lamentations funèbres des Jarai : Cambodge, prov. Ratanakiri. Fév. 2002.
Durée : 04:03. © Patrick Kersalé 2002-2024.
La séquence pas-à-pas
00:00 - L’appel des Muezzins (Inde, Rajasthan). Au Rajasthan comme dans la plupart des pays à dominante musulmane, les muezzins (du turc muezzin, de l'arabe mo'adhdhin) appellent les fidèles cinq fois par jour pour les cinq prières quotidiennes (salat). Les haut-parleurs, généralement situés en haut des minarets, émettent leur appel bien au-delà de la limite de chaque quartier. Il n’est pas rare de pouvoir entendre des dizaines d’appels simultanés dans les villes à forte concentration de lieux de culte.
00:53 - Lecture des textes bouddhiques (Myanmar). Dans cette pagode du bouddhisme theravâda du Myanmar, les jeunes bonzes lisent à haute voix les textes bouddhiques en langue pali. L'enchevêtrement des voix ne semble en rien affecter la concentration de chacun.
01:39 - Polyphonie aléatoire des Hmong (Viêt Nam). Ces quatre jeunes filles hmong ont été réunies afin de permettre un enregistrement des chants pratiqués lors du Nouvel An. Normalement, les chants s’entremêlent à distance puisque les chanteuses (et chanteurs) s’éparpillent dans le hameau lors de cette pratique. Au tout départ, le résultat est quelque peu cacophonique. Puis une certaine cohérence harmonique s’installe, la hauteur des voix se lisse. En revanche, chaque chant demeure différent. Les chansons hmong n’ont pas de ligne mélodique définie, cette dernière suivant les contours des tons de la langue qui en comporte sept plus une variante.
03:06 - Lamentations funèbres des Jarai (Cambodge). Nous assistons ici à la fin des funérailles chez les Jarai du Cambodge (peuple de langue malayo-polynésienne). Une vieille femme chante en solo des lamentations sous l’abri du tombeau. Puis à l’extérieur, quelques femmes proches de la défunte, lui rendent un ultime hommage en partageant une dernière jarre de bière de riz (ici une demi-bouteille en plastique). Ces lamentations collectives, à ce moment précis, durèrent un peu plus d’une minute.
Avec Peter Bosch et Simone Simons, nous assistons à la fabrication d’un chaos artificiel propre à conduire une réflexion sur notre monde. Chaque œuvre invite à poser un regard différent sur le chaos, tant par sa structure matérielle que logicielle. « Krachtgever », par exemple, illustre parfaitement la notion de « relation fonctionnelle » que nous pourrions dénommer, c’est à la mode, « chaos solidaire ». Des caisses en bois, mues par des moteurs indépendants, sont reliées par des ressorts. Le mouvement des unes agit sur celui des autres de manière chaotique. S’il est une œuvre ressemblant au fonctionnement de la vie à la fois biologique et sociale, c’est bien celle-ci. D’une autre manière, dans le bain d’huile de « Aguas Vivas », les molécules solidaires, de type polymère, interagissent. Le résultat, projeté sur l’écran, témoigne du constat éphémère d’un chaos a priori invisible. Ici, notre incapacité perceptive reçoit l’aide de la technologie pour aiguiser notre compréhension du monde du chaos.
Substitution
Dans l’entretien offert à l’équipe de GeoZik, Peter Bosch fait référence au climat, un chaos nourri par le chaos. Les éléments changent de nature, de direction, d’altitude selon les lois physiques élémentaires mais avec une complexité dépassant la puissance de calcul des ordinateurs les plus sophistiqués. De tout temps et sous toutes les latitudes, l’homme a tenté de maîtriser le climat par des incantations, des prières, de la musique, autrement dit, par la communication avec les forces intangibles. La littérature orale ou écrite abonde de témoignages sur les tentatives de déclenchement de la pluie, d’arrêt du déluge… et leurs succès ! L’homme moderne s’offre, lui aussi, l’illusion de sa toute puissance sur ledit climat : le gouvernement chinois ne s’était-il pas engagé à arrêter la pluie au-dessus du stade olympique lors de l’ouverture des jeux en 2008 ?
Que penser de nos sociétés occidentales qui se plaisent à tenter de reconstituer les équilibres naturels, les chaînes alimentaires originelles, à mettre en équation des données parcellaires dans l’intention de maîtriser la nature, de recréer la vie sauvage, au risque de générer une forme chaotique et dramatique méconnue de la genèse. Que penser de nos sociétés promptes à manipuler le vivant, à entrer dans la grande équation de la vie pour créer des formes jusqu’alors inconnues de ce même vivant ? La pandémie du COVID 19 en est malheureusement le bien triste résultat !
Peter Bosch, Simone Simons : une mise en scène du chaos
Peter Bosch et Simone Simons mettent en scène une illusion de chaos. Ils conçoivent des machines sonores pilotées par des logiciels faisant appel à l’intelligence artificielle. Le matériel et le logiciel sont maîtrisés, dans une certaine mesure, jusqu’à ce que les lois du chaos “prennent la main” sur la volonté des artistes. Mais ici, l’humanité n’est en aucun cas menacée…
Genèse, par Peter Bosch
Peter Bosch évoque, dans un entretien réalisé lors de son exposition à la Tour du Pin en 2009, trente années de collaboration avec Simone Simons pour la création de « sculptures sonores » qu’il aime également appeler « machines » parce que toutes leurs œuvres comportent une part de mécanique.
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 03:26. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.
Parcours artistique, par Peter Bosch
Dans ce second entretien, Peter Bosch évoque sa première œuvre, « Was der Wind zum Klingen bringt », réalisée avec des aspirateurs insufflant de l’air dans des embouts de caoutchouc et des chambres sonores constituées de tuyaux, un peu à la manière d’un orgue. Puis vinrent les « Projets Vibratoires », structures placées sur des ressorts métalliques mis en vibration par un moteur.
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 03:52. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.
Systèmes chaotiques, par Peter Bosch
Dans ce troisième entretien, Peter Bosch approche le sens profond de l’œuvre à travers son propre lâcher prise. L’œuvre vit par elle-même, elle doit demeurer incontrôlable : « Nous ne voulons pas contrôler une seule seconde de son. (…) L’une des plus grandes erreurs de nos sociétés est qu’à travers tout, les infos, les journaux, on suggère que tout est contrôlable et ce, pour les choses les plus basiques de la vie. Le climat est le parfait exemple… ».
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 03:02. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.
« Was der Wind zum Klingen bringt »
Was der Wind zum Klingen bringt (1989/1990) est le premier projet conçu et réalisé par Peter Bosch et Simone Simons. Quarante-huit aspirateurs répartis en quatre groupes envoient de l’air vers des embouts de caoutchouc au travers de tuyaux en PVC et en métal agissant comme des chambres d’amplification. Le dispositif est commandé par un ordinateur qui allume et éteint les aspirateurs. Le suivi visuel est assuré par un moniteur. Le système est basé sur le principe d’ “automates cellulaires” développés dans le début des années 1950 par von Neumann et Ulam aux États-Unis. Chaque aspirateur peut être soit mort, soit vivant (noir ou blanc dans la partition). L'ordinateur peut choisir la même procédure pour tous les aspirateurs ou appliquer des règles différentes pour les divers groupes de tuyaux. Les timbres, les harmonies et les dynamiques sont combinés pour créer l'illusion d'un objet vivant. Plusieurs partitions fixes de 8 à 24 minutes ont été créées.
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 01:52. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.
« Krachtgever »
Krachtgever (1994-1998) est une sculpture au caractère dynamique composée de caisses en bois reliées entre elles horizontalement et verticalement par des ressorts de compression, l’ensemble connecté à plusieurs moteurs électriques. Chaque caisse contient divers matériaux et se comporte comme un hochet. Le logiciel, conçu pour l’œuvre, contrôle la vitesse des moteurs en tandem avec le mouvement des caisses. Son but n’est pas de commander les mouvements dans une direction donnée, mais d'intensifier les fréquences présentes afin de remplir l'espace avec le son. Lors de chaque installation, Peter Bosch et Simone Simons adaptent le nombre de boîtes et la taille des piles.
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 02:48. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.
« Cantan un Huevo »
Cantan un Huevo (2000-2001) se compose de plusieurs unités indépendantes de vibration, chacune avec son propre comportement. Des centaines de ressorts métalliques, à l'origine des matelas à ressorts de compression, forment une surface dynamique complexe lorsqu’elle est mise en mouvement. Un moteur oscillant fait s’entrechoquer des bouteilles en verres placées sur ces surfaces. Seul le verre se fait entendre.
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 03:25. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.
« Aguas Vivas »
Aguas Vivas (2001-2004) se compose d’un conteneur en acier rempli d'huile noire monté sur huit ressorts et mu par un moteur oscillant. La surface du fluide est éclairée par un néon en croix entouré d’un cercle de couleur blanche. Les vibrations aléatoires produites à la surface de l’huile sont captées par une caméra vidéo et projetées sur un mur. Les images sont extrêmement énergiques, toujours changeantes et très hypnotiques. Le son est produit par la construction elle-même : ballottement de l'huile, bruit du moteur oscillant et ressorts. Ces diverses sources sont traitées, amplifiées et diffusées en temps réel.
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 02:13. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.
« Último Esfuerzo Rural II »
Último Esfuerzo rural II (2004-2008) se compose de six zambombas, quatre fabriqués à partir de tonneaux en bois et deux à base de bidons métalliques. Sur l’ouverture de chacun d’eux est fixée une peau, du centre laquelle sort un roseau. Un excitateur mu par un vérin hydraulique glisse de long de chaque roseau, produisant des vibrations naturellement amplifiées par la caisse de résonance. Les tonneaux en bois — ou “tambours à friction” si l’on se place sur le plan de organologie instrumentale — produisent principalement des fréquences extrêmement basses. De plus, chacun des quatre tonneaux en bois dispose d’un microphone qui capte la vibration directement sur la membrane. Le son est alors amplifié pour un rendu impressionnant.
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 03:21. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.
À propos de « Último Esfuerzo Rural », par Peter Bosch
Dans cet ultime entretien, Peter Bosch aborde la caractère particulier de cette œuvre par rapport aux productions précédentes car elle n’utilise pas de moteurs vibrants. Il s’agit de tambours à friction mécanisés produisant « une sorte de nuage sonore devenant de plus en plus gros, puis de plus en plus petit. ». Puis il évoque ainsi ces trente années de travail en forme de conclusion : « On pourrait dire que chacune de nos œuvres est en quelque sorte le point de départ vers une longue aventure, avec des découvertes que l’on fait nous-mêmes. Lorsque la combinaison de la découverte, de la qualité du son et d’une espèce de rayonnement spirituel s’assemblent, alors c’est là que notre travail peut être présenté. »
Lieu et date : La Tour du Pin, Novembre 2009
Durée : 03:33. © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2009-2024.