Ainsi que chacun a pu en faire l’expérience, il est infiniment difficile de parler de la mort, notamment en Occident où elle est cachée, niée ou, au contraire, banalisée dans les fictions cinématographiques. Cette difficulté de communication est exacerbée lorsqu’il s’agit d’en parler aux enfants ou de la mort d’un enfant. Malheureusement, ce sujet doit parfois être abordé par les enseignants lorsque survient un drame dans une classe.
Ce dossier a été conçu à la fois comme un projet thématique et comme un outil à l’usage des enseignants lorsqu’ils sont amenés à en parler. Nous l'avons conçu avec un certain positiviste afin qu’il soit un allié. Il est toujours plus facile de parler de la mort lorsqu’elle est éloignée géographiquement, temporellement ou émotionnellement. Aussi avons-nous privilégié les continents africain et asiatique au travers de leur patrimoine immatériel traditionnel, et porté un regard strictement sociologique sur les faits. Chacune des séquences vidéo de ce dossier peut devenir le point de départ d’un échange entre l’enseignant et les enfants ou entre les enfants eux-mêmes.
Textes, photos, vidéos © Patrick Kersalé 2008-2024 (sauf mention spéciale). Dernière mise à jour : 3 octobre 2024.
SOMMAIRE
. Regard bouddhiste
. Regard chrétien
. Regard juif
. Regard musulman
La mort dans le répertoire savant d'Occident
. Devant Ton trône, je vais comparaître – J. S. Bach
. Sonate au Clair de Lune – L. V. Beethoven
. Le tombeau de Mireille – Henri Tomasi
. Funérailles dyan / Polymusique & polydanse
. Interrogatoire du cadavre / Paix aux vivants
. Grandes funérailles gan / Musique & danse
. Grandes funérailles gan / L’heure du pardon
. Funérailles toraja
. Funérailles kinh / Retour au Ciel
PAE connexes
Il nous a semblé opportun, pour introduire ce dossier, d’avoir recours au regard de responsables religieux. Quatre hommes : un moine bouddhiste, un prêtre catholique, un rabbin et un imam témoignent de leur vision de la mort en relation avec la philosophie ou la religion qu’ils représentent. Mais d’autres regards sont aussi disponibles dans ce dossier : un roi africain, un facteur de piano et une ethnologue.
Regard bouddhiste, par le Vénérable Thích Quảng Viên de la pagode Thiện Minh à Sainte-Foy-Lès-Lyon (69)
Lieu : Sainte-Foy-Lès-Lyon (69). Date : 2008. Durée : 02:50.
© Patrick Kersalé 2008-2024.
Regard chrétien, par le père Antoine Fournier, Missionnaire du Sacré-Cœur d'Issoudun.
Lieu : Miribel (01). Date : 2008. Durée : 04:05.
© Patrick Kersalé 2008-2024.
Regard juif, par le Rabbin Daniel Farhi du Mouvement Juif Libéral de France (MJLF) - Paris.
Lieu : Paris. Date : 2008. Durée : 07:01.
© Patrick Kersalé 2008-2024.
Regard musulman, par l’Imam et Professeur de Sciences Islamiques, Sami Abdessalem - Paris.
Lieu : Paris. Date : 2008. Durée : 03:29.
© Patrick Kersalé 2008-2024.
Devant ton Trône, je vais comparaître – J. S. Bach, par Louis Boffard & Didier Martel
Dans ce chapitre, notre propos sera double : nous traiterons de l'œuvre citée dans le titre, mais aussi de l'orgue liturgique qui accompagne les rituels funéraires de l'Occident chrétien depuis des siècles.
Afin de ne pas raviver de douloureux souvenirs pour les uns ou les autres, nous avons pris le parti de ne pas traiter directement de l’aspect funèbre dans les rites chrétiens d’Occident, chacun, enseignant ou élève, en ayant plus ou moins une expérience. En revanche, nous proposons, d’une part à travers une courte œuvre de Johann Sebastian Bach et, événement rare, le baptême d’un orgue, une introduction au monde merveilleux de cet instrument gigantesque. Chacun pourra ensuite, dans sa ville ou sa région, organiser la visite d’un instrument avec les spécialistes locaux.
L’orgue présenté ici est un instrument de taille modeste, installé en 2004 dans la tribune de l’église de Savigny (département du Rhône).
Pourquoi installer un orgue dans une église au XXIe siècle ?
(D’après la plaquette de présentation « Un orgue à Savigny »)
« C’est un projet étonnant, voire un peu “décalé”. Pourquoi construire un instrument dans une église où il y a de moins en moins de cérémonies, où les fidèles se retrouvent moins nombreux, alors que l’accompagnement du chant liturgique s’est largement appuyé, depuis 30 ans, sur des instruments plus à la mode comme la guitare, la batterie, le synthétiseur ? Pourquoi investir autant d’argent pour de la musique alors que tant de causes sollicitent notre soutien ?
La commune de Savigny avait la chance d’avoir une église dotée d’une acoustique reconnue par les musiciens et choristes venus s’y produire.
Une envie, aussi, partagée par un grand nombre de Savignois, d’être associés à une œuvre qui appartiendrait au patrimoine à transmettre aux générations futures, un orgue fédérateur au service de l’émotion musicale, de la méditation, du rassemblement, au-delà des clivages religieux, philosophiques ou politiques. Un orgue digne de promouvoir l’apprentissage et la découverte d’un répertoire varié qui se transmet et s’enrichit depuis plus de cinq siècles. Un orgue qui motive de jeunes talents à porter cet élan culturel. »
Petite histoire de l’orgue de Savigny
C’est un instrument d’origine anglaise construit en 1932 par le facteur George Osmond de Towton (Summerset). À l’origine, il était composé de huit jeux. Racheté par Paul Manuel, facteur d’orgues à Hauteville (Ain), il est remanié et transformé. Les sommiers sont reconstruits, agrandis, des jeux et un soufflet ajoutés. Interrompu en 2002, le projet est repris par Dominique Lalmand, facteur d’orgues à Dole. Il apporte modifications et améliorations : un nouveau ventilateur est installé, des jeux complétés et renouvelés, la façade en zinc remplacée par des tuyaux neufs en étain.
L’instrument est implanté dans la tribune fin 2004. La restauration entreprise dès 1999 aura duré 5 ans. Il est inauguré par Louis Robillard en décembre de la même année et baptisé par Monseigneur Thierry Brac de la Perrière, évêque auxiliaire de Lyon le 18 décembre 2004 (voir chapitre suivant) avec Didier Martel à la console.
Jeux et dimensions de l'orgue de Savigny
Grand Orgue (7 jeux)
Récit expressif (7 jeux)
Pédale (2 jeux)
Claviers et accouplements
Dimensions
L’œuvre choisie
“Devant Ton trône, je vais comparaître”, de son titre original allemand “Von deinen Thron tret’ ich hiermit” (BWV 668), dernière référence des chorals du recueil traditionnellement appelé “Autographe de Leipzig” contenant, entre autres, les dix-huit chorals dits “de Leipzig”. Sur le témoignage de Carl Philipp Emmanuel Bach, Forkel, le premier biographe de Bach, rapporte que ce choral fut dicté par Johann Sebastian Bach à son gendre Altnikol, quelques jours seulement avant sa mort. Il ajoute : « Je ne dirai rien de l’art qu’il a déployé dans ce choral, car cette science profonde de la musique était si familière à l’auteur, qu’il la pouvait exercer même dans sa maladie ». On a proposé un savant décryptage de la symbolique que contiendrait ce choral. Par exemple, la première des quatre périodes du cantique, la seule ornée, compte 14 notes, 14 étant le nombre-signature de Bach ; le nombre total des notes du cantus firmus est de 41, renversement de 14 et autre nombre-signature du musicien ; etc. Ce cantus firmus est celui du choral "Wenn wir in höchsten Nöten sind" (Quand nous sommes dans une grande détresse). Mais sentant sa mort prochaine, Bach changea le titre initial pour celui que nous connaissons maintenant. Ainsi, celui qui toute sa vie a œuvré pour la gloire de Dieu s’apprête à contempler son Créateur dans son éblouissante lumière. Délaissant les figuralismes, il s’abandonne à une sereine méditation, d’une profondeur presque abstraite ; confiant à l’orgue sa dernière prière, il prend congé du monde dans un jeu très savant de formes et de propositions trouvant ici leur souverain équilibre.
Commentaire : Louis Boffard. Organiste : Didier Martel.
Lieu & date : Savigny (Rhône). 18 Décembre 2004. Durée : 07:56.
© Patrick Kersalé 2004-2024.
Analyse d’œuvre : Sonate au Clair de Lune – L. V. Beethoven, par Daniel Gaudet
Daniel Gaudet, musicologue et professeur au CNR de Lyon nous offre ici une remarquable analyse de la Sonate au Clair de Lune de Ludwig Van Beethoven. L’interprétation d’Ignacy Jan Paderewsky est extraite du fabuleux disque de Pascal Marcelin publié aux Éditions Lugdivine “Le passé re-composé de maîtres du piano”. Pascal Marcelin nous propose d’écouter des compositeurs et des interprètes du début du XXe siècle qui jouent sur un piano moderne dénommé “piano idéal”. Une révolution auditive si l’on compare ces versions re-composées aux seuls enregistrements 78 tours disponibles jusqu’alors ! Ne manquez pas notre film documentaire Le passé re-composé de maîtres du piano qui narre l’extraordinaire histoire de ce disque hors du commun.
À propos d’Ignacy Jan Paderewsky (1860-1941)
(Extrait du livret du CD « Le passé re-composé de maîtres du piano », © Pascal Marcelin 2007)
Compositeur, pianiste et homme d’état, Paderewsky véhicule l’aura d’une sommité internationale. Malgré des études difficiles en Pologne, sa détermination à devenir pianiste et son travail personnel acharné en font l’élève de Leschetizky. Avec lui, il acquiert la notoriété d’un héritier de Liszt. Triomphes au Carnegie Hall et dans le monde entier mais controverses aussi, alors que déjà se dessine la nouvelle école, celle de Lhévinne et Rachmaninov.
Parallèlement, il fait ses débuts en politique en fondant un mouvement favorable à l’indépendance de la Pologne, et quatre millions de Polonais aux Etats-Unis voient en lui un chef de file. Il devient successivement ambassadeur à Washington, Ministre des affaires étrangères en Pologne, Président du Conseil, puis Président du gouvernement polonais en exil (France/Etats-Unis). Sa générosité et son goût du luxe le conduisent à utiliser son image en marketing sur des produits de grande distribution : savons, poupées, jouets ; une première dans le milieu classique !
En outre, il nous laisse une centaine de disques où l’on peut saisir son approche passionnée, ses interprétations naturelles et débridées allant jusqu’à altérer le texte au profit d’une forme d’ensemble.
Sonate au Clair de Lune, Ludwig Van Beethoven, par Ignacy Jan Paderewsky
Restitution numérique : Pascal Marcelin.
Durée : 04:57.
Analyse de l'œuvre, par Daniel Gaudet
Lieu & date : Lyon. Juin 2007. Durée : 05:10
Vidéo © Éditions Lugdivine, Patrick Kersalé 2007-2024.
Audio © Éditions Lugdivine, Pascal Marcelin 2007-2024.
Le tombeau de Mireille – Henri Tomasi, par André Gabriel
Dans la musique occidentale savante, un tombeau est un genre musical en usage pendant la période baroque. Il était composé en hommage à un grand personnage ou un collègue musicien (maître ou ami), aussi bien de son vivant qu’après sa mort, contrairement à ce que le nom de ce genre musical pourrait laisser penser. Il s’agit généralement d’une pièce monumentale, de rythme lent et de caractère méditatif, non dénué parfois de fantaisie et d’audace harmonique ou rythmique. C’est le plus souvent une allemande lente et élégiaque ou une pavane, danse de la Renaissance depuis longtemps tombée en désuétude à l’époque de la mode des tombeaux. Contrairement au lamento italien, le tombeau n’est pas censé utiliser les modes expressifs du deuil et de la douleur qui sont alors vus avec scepticisme dans la tradition musicale classique française. Cependant, certains éléments sont notables comme l’onomatopée d’une note répétitive symbolisant la Mort frappant à la porte ou l’utilisation de gammes diatoniques ou chromatiques montantes ou descendantes symbolisant les tribulations de l’âme et sa transcendance.
Quelques tombeaux célèbres
On notera que le genre du tombeau a fleuri en terre catholique où la musique funéraire a une longue tradition, essentiellement en France et en Europe Centrale. Il tombe en désuétude vers la fin du XVIIIe siècle avant de retrouver quelques faveurs au début du XXe siècle avec des accents néo-baroques. Citons Maurice Ravel avec le Tombeau de Couperin ou Manuel de Falla avec le Tombeau de Claude Debussy.
Le tombeau de Mireille
(Présentation © André Gabriel 2000, d’après le CD “L’art du Galoubet-tambourin”, aux éditions ARION, réf. ARN 60523, réalisé par Patrick Kersalé).
Il était à l’époque très rare, pour ne pas dire unique, de composer mais surtout d’éditer dans une grande maison parisienne, une œuvre dont la destination put paraître confidentielle même si, par extension, on peut l’interpréter au hautbois ou à la petite flûte (piccolo).
Henri Tomasi est né à Mazargues et affirmera toujours avec une grande conviction sa double culture corse et provençale. Il commence ses études au Conservatoire de Marseille et couronne sa formation par l’obtention du Grand Prix de Rome en 1927. Le Tombeau de Mireille porte la dédicace suivante : « À Christian Sicard, âgé de 13 ans, tambourinaire poète et mazarguais comme moi. H.T. » Rappelons que notre ami Christian Sicard, qui créa cette œuvre, est également hautboïste et cor anglais solo à l’Opéra de Marseille. Le titre de “tombeau” situe volontairement cet hommage déférent dans le style des “tombeaux poétiques” du Moyen Âge et de la Renaissance, entre allégorie, apologie et déploration. L’inspiration fondatrice puise sa source dans la superposition de trois mythes provençaux où l’amour transcende la réalité :
Composition de l’œuvre (Éditée en 1959 chez Leduc).
Introduction. Variation 1 (Giocoso). Variation 2 (Forlana). Variation 3 (Air). Variation 4 (Giocoso). Romance (Tristesse de Mireille). Farandole (Giocoso).
Pour des raisons commerciales évidentes, cette œuvre, composée pour galoubet-tambourin, est ainsi annoté sur l’édition originale : « pour Galoubet, ou Petit Flûte, ou Hautbois et Tambourin, ou Caisse détimbrée, ou Piano ».
À toutes fins pédagogiques, nous avons pris le parti de présenter cette œuvre filmée avec l’ensemble des annotations portées par Henri Tomasi sur sa partition. Trois lignes ont été utilisées en bas d’écran : sur la ligne du bas, les nuances expressives du tambourin ; sur celle du haut, les nuances expressives du galoubet, sur la ligne intermédiaire, les nuances rythmiques.
Lieu & date : Châteauneuf-de-Gadagne (Vaucluse). Juillet 2002.
Durée : 09:51. © Patrick Kersalé 2002-2024.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Générique puis présentation de l’œuvre par André Gabriel.
03:22 - Introduction.
04:55 - Variation 1 (Giocoso) précédée de quatre rythmiques.
05:39 - Variation 2 (Forlana).
06:22 - Variation 3 (Air).
06:47 - Variation 4 (Giocoso).
07:06 - Romance (Tristesse de Mireille).
08:37 - Farandole (Giocoso).
Funérailles dyan / Polymusique & polydanse
Les Dyan
Les Dyan sont une ethnie d’environ 30 000 personnes installées dans le sud-ouest du Burkina Faso.
La musique
Différentes formes sonores accompagnent la vie quotidienne des Dyan. Voici une liste (non-exhaustive) d’activités accompagnées de musique et/ou de chants : endormissement des enfants, mouture du mil sur la meule dormante, préparation du beurre de karité, stimulation des laboureurs, jeux divers, initiations, funérailles, levée de deuil (dernières funérailles), pêche…
Les chants
Hommes et femmes chantent, mais chacun selon son répertoire. Quand ils ne sont pas interprétés en solo, comme les berceuses, les chants revêtent des caractéristiques communes :
Les funérailles
Les funérailles se déroulent, pour un village donné, toujours au même endroit, sur une large place, au milieu de laquelle se trouve un abri de branchage recouvert de nattes de paille tressée sous lequel prennent place les musiciens. Un second abri est utilisé pour déposer le corps du défunt ou certains des effets le représentant. Les invités du village et des hameaux environnants se regroupent sur cette place par provenance, de manière attitrée et immuable ; la famille du défunt leur offre à boire et à manger (haricots, mil, maïs, bière de mil...) et de quoi dormir.
La particularité des funérailles des Dyan, comme des autres ethnies peuplant le sud-ouest du Burkina Faso (Lobi, Dagara, Gan…) consiste en l’interrogatoire du cadavre.
La musique funèbre instrumentale
La musique funèbre est interprétée par les hommes avec le xylophone čõku (prononcer tchonkou), deux tambours en forme de sablier à variation de tension (gãgõku et dumãku ou seulement le premier) et une clochette à battant externe ou un substitut (outil aratoire, clé de mécanique…) pwenpwenku (prononcer pouenpouenkou).
Le čõku (également connu sous le vocable générique balafon) est un xylophone composé de quinze lames de bois montées sur un cadre. Des calebasses de forme sphérique dont la partie supérieure a été ouverte, sont suspendues sous les lames et servent de résonateur ; leur taille est adaptée à la hauteur de chaque note. Ces calebasses sont percées de plusieurs ouvertures circulaires sur lesquelles sont tendues de très fines toiles (à l’origine le cocon protecteur des œufs d’une araignée), qui ajoutent une stridence recherchée à la sonorité douce de la lame de bois. Chaque lame a une longueur, une largeur et une épaisseur propres. Elles sont frappées à l’aide de deux mailloches terminées chacune par une boule formée d’une superposition de bandes de caoutchouc.
L’entraînement au jeu du čõku s’effectue généralement sur un xylophone sur fosse car l’instrument avec résonateur en calebasses est fragile et toute réparation est une dépense incombant au propriétaire. De plus, compte tenu du caractère sacré de l’instrument, on ne le fait pas sortir de son rangement pour n’importe quelle raison. Lorsque l’entraînement se pratique sur un xylophone sur cadre, il se fait à l’intérieur de la case où il est stocké. La sortie du balafon peut nécessiter une offrande (parfois sacrificielle) à son esprit protecteur.
Les tambours dumãku et gãgõku
Dumãku et gãgõku sont deux tambours en sablier à variation de tension, à deux peaux tendues par un jeu de lanières de cuir. Le premier est un peu plus grand que le second.
Pour le jeu, l’instrument est tenu sous le bras. On frappe l'une des peaux à l’aide d’une baguette coudée. On comprime avec plus ou moins de force les lanières de cuir contre le flanc pour faire varier la tension de la peau et, par conséquent, la hauteur du son. Le tambour souligne les paroles proférées par le xylophone en une forme d’acquiescement, tel qu’on le pratique par exemple lors de la narration de contes ou la récitation de prières.
Louanges funèbres
Seules les femmes chantent lors des funérailles. Les chants funèbres ont une portée sociologique forte : en effet, s’il est de coutume de chanter les louanges du défunt, il peut également arriver que l’on chante ses méfaits. Ainsi, de son vivant, l'individu tente de parfaire son image afin que la part des méfaits chantés lors de son décès soit moindre. À l’image du tambour accompagnant le xylophone, le chœur des femmes acquiesce les paroles de la soliste.
Polymusique et polydanse
La musique instrumentale jouée par les hommes et les chants des femmes se mêlent sans autre rapport musical que les louanges exprimées au défunt. De même, pour la danse, celle des hommes — et des garçonnets non-initiés — et des femmes, bien que très différentes, s’entremêlent. On remarquera que les uns et les autres évoluent autour de l’appentis abritant l’orchestre dans le sens antihoraire, comme c’est le cas de la plupart des danses funèbres à travers le monde. La danse des hommes et des femmes est sonore. Les hommes créent un rythme avec leurs pas et les femmes en faisant claquer leurs seins comme leur ventre !
Lieu & date : Burkina Faso, Province de la Bougouriba. Village de Bonfesso. Décembre 2002. Durée : 05:59. © Patrick Kersalé 2002-2024.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Générique. Situation géographique du Burkina Faso, de la capitale Ouagadougou et du pays dyan. La musique instrumentale, générée par le balafon et les tambours d’une part, les chants de louanges d’autre part, s’entremêlent.
00:29 - Le balafoniste est abrité du soleil par un appentis de branchages et de feuillages.
00:33 - Les hommes dansent selon un pas complexe synchrone, de rythme ternaire, ce qui n'est pas étonnant puisque le nombre trois caractérise les hommes et le quatre les femmes. Par exemple, le tabouret traditionnel des hommes possède trois pieds et celui des femmes. Ils partent toujours du même endroit, font le tour de l’orchestre dans le sens antihoraire. En chemin, ils sont rejoints par les garçonnets non-initiés, puis les uns et les autres retournent vers leur aire de stationnement respective.
00:58 - On remarquera la manière dont les tambourinaires écrasent les liens de cuir reliant les deux membranes afin de faire varier la hauteur sonore et par conséquent, faire “parler” l’instrument. Le joueur de droite frappe alternativement son tambour et la première lame du balafon.
01:18 - L’aire des femmes, vue depuis l’appentis des musiciens. En premier plan, l’extrémité d’un arc signifiant qu’il s’agit des funérailles d’un homme.
01:35 - Une femme, debout, chante des louanges au défunt. Les femmes assises répondent en chœur.
01:43 - Le défunt s’appelle Daourou Kam. Une femme chasse les mouches de son chasse-mouches en queue de cheval.
02:03 - À tour de rôle, des femmes assurent le chant soliste.
02:24 - L’aire des femmes, vue depuis l’abri du défunt.
02:28 - Un balafon à quinze lames attend de rentrer dans le champ cérémoniel. On remarquera la poignée qui en permet le transport.
02:31 - Le balafoniste part avec son instrument. Il est relevé.
02:58 - Quatre femmes, dont l’épouse du défunt, en blanc, vont saluer le nouveau balafoniste avant de revenir saluer le défunt. L’épouse du défunt part faire le tour du balafon, soutenue physiquement — et moralement — par deux femmes.
04:22 - On remarquera la prééminence sonore de l’outil aratoire percuté.
04:50 - Les poulets, rétribution des musiciens.
05:08 - On remarquera, sur la plus grosse calebasse, des plumes et des coulures de sang provenant de poulets sacrifiés en l’honneur de l’esprit protecteur du balafon. Selon la croyance, cette entité vit dans certaines calebasses de l’instrument. On remarquera également, sur le second résonateur, trois points blancs en triangle, cocons d’araignées collés sur une ouverture circulaire offrant au son une stridence recherchée.
05:11 - Le tambour invite les danseurs.
05:21 - Le champ cérémoniel vu depuis l’aire des hommes. Appelés par le tambour, hommes et femmes s’élancent simultanément. Les garçons non-initiés se joignent aux hommes. On entend distinctement les claquements de seins des femmes. Chaque groupe rejoint son aire.
Interrogatoire du cadavre / Paix aux vivants, par Sa Majesté le 28e roi des Gan
Au Burkina Faso, chez les Gan comme chez les Dyan, lorsqu’il y a décès, on procède à l’interrogatoire du cadavre. Que la mort soit le résultat de la vieillesse, d’une maladie, d’un accident ou d’une rixe, la raison profonde doit être élucidée. Toutefois, cet interrogatoire n’a pas pour seul objectif de déterminer la cause réelle, mais de réconcilier les parties, de rétablir l’harmonie sociale et spirituelle. La quête du pardon est recherchée. Si celui désigné comme “coupable” ne pardonne pas au défunt, alors il ne pourra gagner le pays des ancêtres. Par conséquent, si le défunt ne peut gagner le pays des ancêtres, son influence néfaste risque de répandre le malheur dans le monde des vivants. Ce rapport de force est l’un des moteurs de la demande de pardon au nom de la collectivité.
L’interrogatoire présenté dans cette séquence a été filmé chez les Dyan, le lendemain des cérémonies funéraires présentées dans la section précédente. Les Dyan sont géographiquement voisins des Gan (informations dans la section suivante). L’interview est celle du 28e roi des Gan, ethnie qui pratique elle aussi l’interrogatoire du cadavre.
Lieux & dates :
. Interview du roi : Burkina Faso. Prov. du Poni. Vill. d’Obiré. Décembre 2002.
. Funérailles dyan : Burkina Faso. Prov. de la Bougouriba. Vill. de Bonfesso. Décembre 2002.
Durée : 04:17. © Patrick Kersalé 2002-2024.
Les séquences pas-à-pas (en italique, le témoignage du 28e roi des Gan)
00:00 - Générique. Situation géographique du Burkina Faso, de la capitale Ouagadougou, des pays dyan et gan.
00:28 - Le défunt (voir section précédente) a été inhumé la veille vers 16 heures. Au petit matin, se déroule l’interrogatoire du cadavre. Les hommes du village arrivent, chacun avec son siège (tabouret traditionnel à trois pieds ou chaise moderne).
00:46 - « Quand on interroge un cadavre, on veut savoir de quoi il est mort, dans quelles circonstances il est tombé malade. Est-ce qu’il était en désaccord ou en conflit avec un membre de la famille ? » A-t-il enfreint un interdit ? Ils cherchent à savoir d’abord comment il a attrapé cette maladie. »
01:02 - Deux personnes (des fossoyeurs) porte un brancard de branchage sur la tête. Sur ce dernier est disposée une natte enroulée contenant des effets ayant appartenu au défunt. Le chef du village commence l’interrogatoire en formulant des questions fermées. Il demande par exemple si la faute incombe à son village. Si la réponse est négative, il laisse la place au chef de terre. Ce dernier demande si c’est la terre qui l’a “mal tenu”. Si la réponse est négative, il laisse la place au responsable des funérailles qui peut poser tout type de questions jusqu’à trouver la cause de la mort. À chaque question posée, l’âme du défunt répond par oui, par non, ne répond pas, va désigner quelqu’un, formule une requête codée. La lecture est directement faite pas les villageois par décodage des mouvements du brancard (inclinaison à gauche, à droite, marche en avant, en arrière…).
01:17 - « Cela peut être une agression venant d’une autre personne qui va provoquer même la mort. On veut savoir : pourquoi cette agression ? Pourquoi il a été agressé jusqu’à la mort. Est-ce le comportement du mort qui a provoqué cette agression. Cela permet de savoir qui est fautif. »
01:36 - L’âme du défunt va désigner un membre de l’assemblée. « Est-ce le mort ou le vivant qui a commis l’erreur ? »
01:55 - « C’est à partir de ce moment-là qu’on cherche à savoir ce qu’il faut faire pour qu’il y ait pardon. »
02:03 - Le chef du village rend compte. « À celui qui vit encore de pouvoir réintégrer son milieu, de pouvoir vivre en parfaite harmonie parmi les vivants et permettre aux morts aussi d’être pardonné ou de pardonner afin de pouvoir rejoindre les ancêtres. »
02:29 - Différents membres de l’autorité villageoise et familiale se relaient pour interroger le cadavre. « C’est là le but de l’interrogation du cadavre. On veut savoir qu’est-ce qui a provoqué la maladie jusqu’à la mort. »
02:46 - Les fossoyeurs se dirigent vers le balafon. Le balafoniste joue une dernière fois pour le défunt et un homme fait un simulacre de vengeance avec l’arc pour montrer que le défunt était un homme valeureux. (Autrefois, un meurtre était vengé par le sang).
L'interrogatoire du cadavre à travers la littérature orale des Gan
La littérature orale des Gan est riche d'une immense littérature orale contenant des contes, des légendes, des chantefables, des proverbes ou encore des devinettes. Il existe notamment un conte traitant de l'interrogatoire du cadavre.
Grandes funérailles gan / Musique & danse
Cette courte séquence présente la musique, le chant et la danse telles qu’ils sont pratiqués lors des grandes funérailles chez les Gan. Voir les informations détaillées dans la section suivante : L’heure du pardon.
Lieu et date : Burkina Faso, Province du Poni, Village de Saage. Décembre 1999. Durée : 01:35. © Patrick Kersalé 1999-2024.
Grandes funérailles gan / L’heure du pardon , par Sa Majesté le 28e roi des Gan
Si les religions du livre ont pour objectif la quête d’une vie harmonieuse entre les êtres, la religion traditionnelle des Gan n’a de cesse de maintenir elle aussi cette harmonie, notamment à travers la notion du pardon, qui est toujours la clé de cette harmonie.
Chez les Gan, la maladie ou la mort ne sont pas liées à une pathologie bactérienne ou virale, mais aux conséquences d’un acte ou d’une série d’actes contrevenant à l’ordre établi. Ainsi, depuis toujours, la maladie ou la mort sont liées à des choix de vie, à la conséquence des actes posés, une sorte d’équivalent du karma des Bouddhistes. (Regard bouddhiste).
La période des grandes funérailles (également dénommées “dernières funérailles” ou “levée de deuil” puisque c’est à ce moment que la famille abandonnera le port de la tenue de deuil) est celle du pardon public. C’est à ce moment que se règlent, au sein de la famille et vis-à-vis des tiers, les dettes contractées par le défunt. Ce dernier ne pourra pas gagner le pays des ancêtres tant que toutes les dettes n’auront pas été apurées.
Les grandes funérailles sont célébrées plusieurs mois, voire un an à trois ans (dans le cas où les moyens financiers ou les vivres manquent) après le décès, pour éloigner l’esprit du défunt de l’univers des vivants, lever officiellement le deuil et, le cas échéant, procéder à l’ancestralisation. Elles durent une semaine et ont lieu quand toutes les récoltes ont été rentrées, entre mars et mai. Au cours de ces cérémonies, on convie de nombreux invités, on tue des animaux à la fois pour les sacrifices cérémoniels et la consommation des humains, on prépare du tô (bouille épaisse de mil, nourriture de base des populations sahéliennes) et de la bière de mil en abondance.
Pour tout connaître sur les Gan (ou presque !), cliquez ici.
Chants polyphoniques et métaphores
Lors des grandes funérailles, les femmes pratiquent essentiellement une forme de chant responsorial polyphonique hétérophonique avec ou sans tuilage. Les chants s’organisent de plusieurs façons (liste non-exhaustive) :
Les voix de la polyphonie s’organisent librement sur tous les degrés d’une échelle considérée. Il est important de noter que le texte des réponses diffère en fonction des interprètes. Le nombre de voix de la polyphonie n’est pas fixe et les variations sémantiques de chaque voix lui donnent parfois une forme contrapuntique aléatoire.
Répertoires
Les textes, en langage clair, métaphorique ou proverbial, anciens ou récents, ont plusieurs rôles sociaux :
Puissant instrument d’enseignement de la tradition, de la morale et du savoir-vivre ensemble, chacun peut puiser dans les métaphores, la matière culturelle qui lui permettra de vivre en harmonie avec la nature et ses semblables. La forme chantée fait véritablement partie du patrimoine de la littérature orale, au même titre que les textes parlés. Ne trouve-t-on pas, d’ailleurs, une forme intermédiaire entre les textes parlés et les chants : les chantefables.
Vous trouverez, en cliquant ici, une série de métaphores et de proverbes extraits de chants polyphoniques interprétés lors des dernières funérailles.
L’instrumentarium musical des grandes funérailles
Divers instruments de musique et autres outils sonores sont utilisés lors des dernières funérailles des Gan : tambour koto, tambour bɛrɛ̃ntɛ, tambour kpegbe bie, clochette bᴐyᴐ, ceinture-sonnailles tãgɩna. Vous trouverez un descriptif de chacun d'eux en cliquant ici.
La séquence ci-après, de portée universelle, donne à chacun l’occasion d’une réflexion sur la place du pardon et des conséquences de l’exclusion dans les sociétés du monde. Le 28e roi des Gan, homme visionnaire, nous éclaire de sa sagesse personnelle et de celle de la société qu’il incarne.
Lieux & dates :
. Interview. Burkina Faso, Province du Poni, Village d’Obiré. Décembre 1999.
. Musique pour les grandes funérailles. Burkina Faso, Province du Poni, Village de Saage. Décembre 1999.
Durée : 06:15. © Patrick Kersalé 1999-2024.
La séquence pas-à-pas
Nous avons reporté, en caractères italique, le témoignage de Sa Majesté le 28e roi des Gan et en caractères droits les commentaires afférents aux images.
00:00 - Situation géographique du pays gan.
00:21 - Danse circumambulatoire dans le sens antihoraire à l’occasion des grandes funérailles. Hommes et femmes se déplacent autour du tambour koto.
00:36 - « La musique est très importante dans le culture gan. Si jamais elle disparaissait, c’est la culture gan qui disparaîtrait. »
00:48 - Générique.
00:53 - « Rien ne se fait dans le pays gan sans musique. Quand il y a la maladie, c’est la musique, quand c’est des manifestations d’agriculture, c’est la musique, quand il y a la mort, c’est la musique, tout est fait avec la musique dans le milieu gan. Cela est très important parce que la musique est l’élément qui éveille le sentiment de détresse, qui éveille le sentiment de joie. Elle est très donc importante dans la culture gan. La perdre, ce serait perdre la culture car on ne pourrait pas imaginer que lors des funérailles, il n’y ai ni chants, ni danse. »
01:26 - Tambour bɛrɛ̃ntɛ.
01:39 - Clochettes bᴐyᴐ.
01:43 - Les femmes tiennent à la main des branchages de feuilles vertes à défaut des traditionnelles queues de cheval qui font désormais défaut.
01:46 - Ceintures-sonnailles de cauris tãgɩna.
01:48 - Tambour koto proprement dit qui donne son nom à l’ensemble.
01:57 - « La culture gan c’est aussi la culture du pardon. Dans la culture gan nous avons un moment de pardon public. (02:08 : tambour kpegbe bie). C’est le moment où même celui qui a été blessé, importuné, même s’il n’est pas là, on demande pardon à son esprit, à son âme. C’est lors des grandes funérailles qu’il y a le grand pardon. On demande pardon aux esprits, aux vivants et c’est lors de ces funérailles que les gens opposés se pardonnent. La culture gan n’a pas d’exclusion. Ce n’est pas parce que vous avez un enfant impossible ou un malfaiteur dans la famille qu’il faut le marginaliser. (…) Il en est de même pour les grands malades (lépreux, épileptiques), ils ne sont pas exclus, on les garde jalousement dans la famille. Que quelqu’un d’une autre famille ne vienne pas vous dire : Vous avez un malade que vous avez abandonné ! Vous vous croyez supérieur à qui, alors que vous ne pouvez pas vous occuper de votre malade, vous ne pouvez pas vous occuper de votre pauvre, vous ne pouvez pas vous occuper de votre enfant mal éduqué ? De ce fait, il n’y a pas d’exclusion dans la société gan. Et comme il n’y a pas d’exclusion, il y a le pardon. On ne peut pas mettre quelqu’un en marge de la société parce qu’il est mauvais. On doit l’encadrer. Si vous mettez un membre de la famille hors du circuit familial, c’est lui donner la liberté d’agir comme il veut. C’est pour cela qu’on ne peut l’exclure. Il y a le pardon. Et le grand pardon, c’est lors des dernières funérailles. Quand vous avez fait du mal à quelqu’un qui meurt sans vous avoir pardonné, c’est pendant les funérailles que le pardon se demande. Et pour cela, vous apportez ce que vous avez, soit des vivres, soit de la volaille, quelque chose en tout cas qui puisse vous mettre en communion avec l’esprit, qui puisse vous permettre de vous adresser au milieu d’abord humain et puis au milieu spirituel comme quoi vous demandez le pardon. À ce moment-là, on croit que votre disposition peut appeler le pardon de celui qui n’est plus. Ne pas pardonner, c’est se condamner soi-même parce que demain, vous serez peut-être amené à commettre un acte de ce genre. Donc il faut pardonner. C’est l’exclusion qu’il faut éviter. »
05:43 - Tambour koto, clochettes bᴐyᴐ puis ceintures-sonnailles tãgɩna.
08:05 - Générique.
Funérailles toraja, par Dana Rappoport
Les Toraja
Les Toraja, population de 755 000 personnes, occupent les montagnes du centre de Célèbes (dite aussi Sulawesi), en Indonésie. Parlant une langue austronésienne du groupe malayo-polynésien occidental, ils appartiennent à l’aire culturelle de Célèbes-Sud, et malgré leur parenté linguistique et mythique, ils se distinguent de leurs voisins musulmans des côtes et des plaines — Bugis, Makassar, Mandar — par l’importance attachée aux cultes des ancêtres, par la vigueur des pratiques rituelles et par une musique essentiellement chorale.
Bien que la plupart des populations de Célèbes-Sud aient été islamisées à partir du XVIIe siècle, les Toraja ne se sont pas convertis à l’islam. Avant l’arrivée des missionnaires protestants hollandais en 1906, les habitants de ces montagnes désignaient leur pays par l’appellation “Cercle de Lune” (Lepongan Bulan) et pratiquaient sans entraves la religion traditionnelle (“Règles des ancêtres”, Aluk to dolo). Si les premières conversions ont véritablement eu lieu dès 1930, la christianisation massive n’a été effective qu’à partir des années 1960-1970.
Les Toraja sont riziculteurs et pratiquent l’élevage (porcs, buffles). Le buffle, symbole de pouvoir et de richesse, est l’animal roi, omniprésent tant dans la vie quotidienne que rituelle (il est gravé en quadrichromie sur les façades en bois sculpté des maisons traditionnelles, sur “pilotis”, avec des toits en forme de selle).
La musique dans le système rituel
Seuls les Toraja de la plus haute classe — considérés d’ascendance divine — se doivent d’introduire la musique dans leurs fêtes. Eux seuls accomplissent toutes les étapes graduelles qui conduisent à la divinisation. La musique, telles les hécatombes animales, n’a en principe lieu que pour les fêtes du sommet de “l’échelle” — l’offrande animale allant toujours de pair avec l’offrande musicale. Si la musique, dans cette dramaturgie qui s’édifie pour les vivants, les morts et les dieux, selon un ordre socioreligieux rigoureux, est bien un signe extérieur de richesse, elle est surtout l’adjuvant du passage d’un monde à l’autre.
Une musique chorale
Dans la musique toraja, ce n’est ni la mélodie — qui peut sembler peu développée — ni le rythme qui retiennent l’oreille de l’auditeur occidental. Pour les Toraja, l’importance est avant tout accordée à l’homogénéité du timbre choral, à la fusion continue des voix, à la qualité de la profération collective, au continuum sonore. Lors des funérailles, les Toraja pratiquent une musique de type responsorial* et antiphonal. L’intervalle harmonique privilégié est la seconde (non tempérée). L’ambitus mélodique, très restreint, ne dépasse pas l’intervalle de quinte. Les mélodies sont souvent construites sur un tétracorde (sol la sib do). Enfin, la musique toraja se caractérise par une économie de moyens, par une esthétique caractérisée par de longues tenues sur une seule hauteur et par une épaisseur harmonique.
Les textes
La métrique des chants funéraires repose sur des strophes de deux, trois ou quatre vers. Dans le chant funèbre badong, les vers sont le plus souvent regroupés par distiques soit de deux octosyllabes (8-8) soit d’un octosyllabe et d’un heptasyllabe (8-7) mais ils peuvent aussi être groupés par trois octosyllabes (8-8-8), par quatre (couples de distiques) ou cinq, le troisième vers étant alors un heptasyllabe. Alors que la parole génère l’efficace rituelle de toute musique vocale, sitôt chanté, la voilà démembrée, phonème par phonème. Le plus souvent, ce n’est pas la compréhension du mot qui importe mais son énonciation seule.
La ronde funéraire badong
Le badong est le chant le plus populaire. Même émigrés, les Toraja continuent à tuer porc(s) et buffle(s) et à le danser lors des funérailles. Le badong, surtout exécuté par les hommes, est régi par des règles spatiales et verbales. Exécutée en sens inverse des aiguilles d’une montre, la ronde rituelle badong est pratiquée sur l’espace du sacrifice animal, terre encore rougie de sang et de cendres, jour et nuit.
La parole chantée dépend du rang social du défunt et du rite accompli. Il existe un badong spécifique à la descente du corps de la maison au grenier à riz, un autre pour le transport du cercueil ou au moment du départ du corps à la sépulture (dans une cavité creusée dans la falaise, ou dans un rocher, ou dans une petite maison mortuaire). Long poème chanté par fragments, en forme d’ode, le badong est fondé sur la vénération du défunt (par la narration de sa vie : de sa conception à sa naissance, à son développement, à sa mort, à sa transformation parmi les dieux). Lors de la fête, les Toraja ne chantent le poème que par fragments. Il n’est dit en globalité que pour les plus grands rites funéraires. Sa structure narrative est commune à chaque région ; seule la réalisation du chant est toujours plus ou moins variée.
À propos du badong, on peut mettre en évidence deux paradoxes : alors que ce chant semble musicalement très simple (à l’unisson, dans un ambitus très restreint, alternant deux durées), il est pourtant difficile à mémoriser et il existe dans chaque région une abondance de mélodies différentes, à partir de deux à quatre notes seulement. À Baruppu’, par exemple, on recense plus de quatre-vingts types de badong, chacun correspondant à un tempo (rapide ou lent), donc à un type de pas et à une position de bras (repliés ou dépliés), et à une organisation mélodico-rythmique. Le second paradoxe, c’est que malgré l’importance religieuse du texte, relevant de la “règle” (aluk) — ils doivent prononcer un certain type de paroles —, les paroles chantées sont souvent incompréhensibles. Alors que le chant s’enracine dans la prononciation d’une parole, le texte semble éclaté, désarticulé, démembré syllabe par syllabe.
Modalités d’exécution
Si le chant est conçu à l’unisson, il peut être quelquefois chanté à deux parties parallèles à la quarte ou à la quinte. Il existe deux catégories de badong : soit sans alternance de solistes, soit en antiphonie ornée à la seconde avec quatre groupes de solistes. Le badong sans solistes est ouvert à tous ; celui avec solistes est mené par un groupe de connaisseurs.
Dans le badong en antiphonie, les rôles sont répartis ainsi : quand le chant va commencer, quelqu’un dit : “que dit la lamentation ?” et le souffleur (“celui qui dit la lamentation”, le pa’bating) lance le vers à chanter. Il doit savoir “tisser la lamentation”, c’est-à-dire ajuster les versets les uns à la suite des autres. Dans certaines régions et dans certaines fêtes, il n’y a pas de pa’bating : les solistes commencent seuls selon leur propre choix et le chœur répond.
Chacun des quatre groupes de solistes est composé d’un meneur, “celui qui puise, qui prend” (le pa’tindok), et de plusieurs brodeurs, “ceux qui serrent, qui pressent, qui encadrent” (les passa’pi’), qui ornent l’unisson à un intervalle de seconde. Le meneur principal de la ronde choisit l’air à chanter : il donne d’abord le tempo par un mouvement de bras et de pieds puis entonne le chant en solo ; il est accompagné aussitôt par ses deux compères à sa droite et à sa gauche. Ce premier groupe de solistes, “ceux qui génèrent” (pangindo’), n’entonne que les premières syllabes du premier mot du vers. Aussitôt après, le deuxième groupe, “les renvoyeurs” (balina), situé en face, renvoie la deuxième partie du mot, soutenu par le chœur, ensuite les troisième et quatrième groupe, les “quarts” (tepona), ponctués chacun par le chœur, finissent le vers.
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Texte extrait du CD « Indonésie, Toraja, Funérailles et fêtes de fécondité. Collection CNRS – Musée de l’Homme. Ref. CNR 2741004. © Dana Rappoport 2005-2024.
1. Introduction
2. Objectif
3. Pourquoi chanter ?
4. Pourquoi chanter ensemble ?
5. Symbolique du badong
6. La danse randing
Lieu & date de tournage des 6 séquences : Indonésie, île de Sulawesi, commune d’Ulusalu. 26 octobre 2005. © Patrick Kersalé 2005-2024.
1. Introduction
Durée : 04:09.
La séquence pas-à-pas
Pour la présentation des six séquences, nous avons noté en italique le résumé du propos développé par Dana Rapport et en caractères droits des informations sur les plans de coupe.
00:00 - Il s’agit, dans ce générique récurrent, de la maison provisoire dans laquelle se trouve le cercueil. Sur le plan sonore, on entend un entremêlement de deux rondes badong chantant en polyphonie, créant ce qu’il est convenu d’appeler une polymusique*.
00:13 - Ronde badong sur le champ cérémoniel avec l’arrivée des invités.
00:39 - Maison provisoire du défunt en haut.
00:42 - Présentation succincte des Toraja. Situation géographique des Toraja.
01:09 - Présentation de la mort et des rites funéraires dans la société toraja.
01:19 - Cercueil.
01:24 - Effigie du défunt, reproduite de manière réaliste par des sculpteurs spécialisés. Elle est disposée à l’entrée de la salle de réception des invités.
01:50 - Procession des invités arrivant sur le champ cérémoniel.
02:05 - Cercueil puis procession des invités.
02:45 - Buffles-offrandes. À propos des outrances cérémonielles.
03:12 - Porcs-offrandes.
03:26 - Ronde badong et procession des invités.
03:29 - Deux rondes badong.
2. Objectif
Durée : 01:30.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Générique.
00:12 - Objectif des funérailles.
00:23 - Maison provisoire du défunt.
00:42 - Cortège des femmes apportant thé, café, gâteaux, bétel, cigarettes aux invités lors de l’accueil initial.
00:45 - Viande des animaux sacrifiés cuite dans des bambous.
01:18 - Ronde badong.
3. Pourquoi chanter ?
Durée : 06:15.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Générique.
00:12 - Le chant n’est pas un divertissement, il agit.
00:18 - Chanteur de retteng. Le chant est diffusé sur le champ cérémoniel à grand renfort de haut-parleurs. Le retteng est un genre de poésie rituelle argumentative organisée autour de citations et de métaphores élaborées permettant de commenter, d’évaluer et de façonner l’exécution du rituel tel qu’il se déroule, et par là-même, de (ré)affirmer les valeurs morales de la société.
00:42 - Le chant a plusieurs fonctions : transformer l’âme du défunt en ancêtre, oublier sa peine, représenter une offrande cérémonielle.
00:50 - Ronde badong.
01:56 - Chanteur de retteng.
02:53 - Chanteurs-danseurs de badong.
03:54 - Porc-offrande.
04:11 - Un buffle a été sacrifié ; on le déplace pour le découper.
04:22 - Effigie du défunt puis danseurs de badong.
05:37 - Danseurs de randing. La danse et le chant font partie d’une catégorie dénommée bating (lamentation).
4. Pourquoi chanter ensemble ?
Durée : 04:19.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Générique.
00:13 - Le savoir musical des Toraja est partagé entre les spécialistes de la poésie et ceux qui détiennent la connaissance de la mise en bouche.
00:26 - Danseurs de badong.
00:49 - Déclamation d’un quatrain dont le dernier vers sera ensuite chanté par le chœur.
01:18 - Pourquoi chanter plutôt que parler ?
02:29 - À propos du culte de la compétition.
02:34 - Combats de coqs, de buffles. Trois rondes badong chantent sur le même champ cérémoniel.
5. Symbolique du badong
Durée : 02:56.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Générique.
00:12 - Il y a une analogie entre la structure du chant badong et la découpe de la viande.
00:23 - Procession des invités précédée des danseurs de randing.
00:31 - Jeunes filles en costume traditionnel faisant une haie d’honneur pour accueillir les invités. Danses badong.
01:05 - Des membres de la famille viennent remercier, par leur présence au centre de la ronde, les danseurs de badong venus d’un autre village.
01:34 - Décomposition succincte de la structure du chant badong.
02:28 - Partage de la viande de buffle.
6. La danse randing
Durée : 02:00.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Générique.
00:13 - Danseurs de randing. -
00:21 - Dans les funérailles de gens de classe noble sont parfois invités des danseurs de randing. Ils semblent incarner une réminiscence de la chasse aux têtes pratiquée autrefois pour les funérailles. Divers plans des danseurs.
Funérailles kinh / Retour au Ciel
La mort, rupture de l’équilibre social, affectif et cosmique
Au Viêt Nam, comme dans toutes les autres régions du monde, les funérailles sont l’objet de rites parfois complexes. D’une manière générale, les rituels et les formes sonores les accompagnant ont subi de faibles transformations au fil du temps. Force est de constater que même dans les sociétés les plus développées, on rencontre encore des rituels séculaires voire millénaires. Devant la peur qu’elle inspire, on ne touche pas à la mort.
La mort est une rupture de l’équilibre social, affectif et cosmique. Le corps disparaît, enseveli ou incinéré, arraché à l’organisation sociale, familiale et cosmique. L’homme admet intellectuellement l’arrachement physique de l’être à la terre nourricière mais croit le plus souvent à une continuité de la vie de l’âme quelque part dans l’univers. Aussi, les rituels s’attachent-ils, d’une part, à rendre hommage à celui ou celle qui a servi la société et la famille et, d’autre part, à négocier la paix avec cette l’âme survivante tout en l’utilisant comme médiateur auprès des ancêtres. La plupart des grands rituels funéraires tentent d’établir une communication entre le monde des vivants et celui des morts. Elle se matérialise sous différentes formes, inclusives ou exclusives, faisant appel aux sens et à ceux des défunts : visuelle (parures, statuaire, peinture, art floral...), olfactive (encens, fleurs...), gustative (nourritures et boissons) et auditive (récitations, invocations, pleurs, cris, lamentations, chants, formes sonores instrumentales...). Chez les Kinh, la communication avec l’âme du défunt avant qu’elle n’ait quitté son corps (au-delà du 49e jour selon la croyance bouddhique) est réalisée avec ces moyens sensoriels de communication. Sur un plan purement auditif, la communication verbale et les pleurs ont beaucoup d’importance.
La musique funéraire du Viêt Nam, un art en voie de réhabilitation
Cette séquence présente une procession funéraire. Elle vient de quitter le domicile du défunt et se rend vers l’antépénultième demeure de ce dernier. En effet, après trois années, le corps sera déterré, les os nettoyés, parfumés et disposés dans une urne en terre qui sera placée dans un tombeau définitif. Cette procession est conduite par les porteurs d’étendards et de bannières bouddhiques, suivis des musiciens, du porteur de la photographie du défunt, du cercueil, des pleureuses, de la famille, puis des amis et relations.
Pendant la révolution, la musique funéraire a été interdite, non officiellement par une loi, mais dans les faits. La police prétextait par exemple qu’il ne fallait pas jouer afin de ne pas gêner les voisins ! L’interdiction totale n’était donc plus tellement éloignée. Aussi, y a-t-il eu une forte déperdition culturelle sur le plan musical au cours de cette période. Après la révolution, les jeunes furent envoyés auprès des anciennes générations de musiciens ayant conservé le savoir afin de se former. Aujourd’hui, les orchestres funéraires connaissent un renouveau tant dans les campagnes que dans les villes.
Grandioses funérailles d’autrefois
À l’époque féodale, plusieurs orchestres funéraires pouvaient être conviés lors d’une cérémonie funéraire. En effet, si le défunt était un notable important, de nombreuses personnes et personnalités venaient présenter leurs condoléances, ce qui nécessitait la prolongation de celles-ci sur plusieurs jours ; les orchestres se relayaient alors jour et nuit.
Concours et modifications de style
À cette même époque, lorsque plusieurs orchestres étaient rassemblés, un concours était parfois organisé pour récompenser le meilleur d’entre eux, le gagnant ayant l’ultime honneur de conduire la procession finale accompagnant le défunt jusqu’à sa dernière demeure. Ce phénomène de concours était prompt à stimuler l’innovation. Ainsi, au début du XXe siècle, en pleine colonisation française, des airs inspirés de la musique militaire occidentale furent introduits dans la musique traditionnelle funéraire, pratique qui se poursuit aujourd’hui encore.
Le statut des musiciens et des pleureurs
Même s’ils sont rémunérés pour leurs services, les musiciens de funérailles ne sont pas des professionnels. Le prix demandé n’est pas fixe, mais fonction du niveau de vie de la famille endeuillée et fixé subjectivement après négociation. Parfois, lorsque la prestation des musiciens a satisfait, il leur est alloué une gratification pouvant aller jusqu’à la moitié d’un montant initialement convenu.
Autrefois, la mode des pleureurs et pleureuses professionnels était très prisée. Éliminé à partir de 1954, ce métier fait un retour en force depuis quelques années dans les campagnes et les villes, nécessité économique oblige ! En effet, ce type de service est, pour peu que l’intervenant ait du talent et sache préparer des textes bien appropriés, beaucoup plus rémunérateur que de cultiver les champs ! Il est aujourd’hui essentiellement exercé par des personnes pauvres venues de zones rurales.
Déroulement des funérailles chez les Kinh du nord du Viêt Nam
Ce scénario représente le cas général et peut, bien entendu, être assorti de nombreuses variantes.
Composition de l’orchestre funéraire
Nous nous limiterons à la description succincte des instruments présents dans cette procession.
Lieu & date : Viêt Nam, province de Vĩnh Phúc, Village de Gia Trung. Mars 1999. Durée : 05:21. © Patrick Kersalé 1999-2024.
Narration du commentateur
Le monde des vivants et celui des morts forment un tout indissociable. C’est pourquoi, lors des funérailles, on ne néglige aucun détail pour honorer le défunt.
Derrière le catafalque, il est de coutume que les femmes pleurent bruyamment. D’ailleurs, les familles ont parfois recours aux services de pleureuses professionnelles lorsqu’il n’y a pas suffisamment de filles ou de belles-filles pour le faire.
Dans l’orchestre funèbre, l’instrument le plus important est le hautbois kèn. Son timbre puissant et plaintif symbolise les pleurs et se fait l’écho de la douleur de la famille.
Les pleurs sont codifiés. Le chagrin exprimé bruyamment lors de la procession laisse place, à ce moment de la cérémonie, à plus de retenue afin que le disparu puisse gagner sereinement le monde des morts.
La mort ne met pas fin à la relation entre les vivants et les défunts. Il s’agit seulement du commencement d’un autre type de rapport qui s’établit à travers le “culte des ancêtres”. C’est le fils aîné de la famille qui a la charge d’honorer les disparus, généralement les quatre dernières générations. Dans chaque maison, un autel leur est dédié. On comprendra d’autant plus aisément que ce culte soit pratiqué par la plupart des Kinh si l’on sait que les morts contribuent à protéger les vivants, à leur apporter chance et prospérité. Devant l’autel, on demande aux ancêtres leur soutien pour tous types de projets. C’est aussi le lieu où l’on prend les grandes décisions. En échange, on leur offre de l’argent votif, des nourritures terrestres, ou encore des représentations en papier de tout ce que le monde moderne peut offrir : moto, voiture, télévision ou encore téléphone portable dont ils pourraient avoir besoin là où ils se trouvent. Si les ancêtres participent au développement du pays, ils en tirent également les bénéfices.
La séquence pas-à-pas
00:00 - Tête de la procession funéraire : porteurs d’étendards et de bannières bouddhiques.
00:13 - Tambour en forme de tonneau trống tế (prononcer tchõm té).
00:17 - Deux hautbois kèn.
00:20 - Photographie du défunt et cercueil. La famille porte le turban et les tuniques blancs en signe de deuil.
00:36 - Tambour trống tế et gong chiêng (prononcer tchieng). Divers plans de la procession avec famille proche et sympathisants.
01:22 - La fosse est prête à recevoir le cercueil. On distingue une mélodie militaire d’origine occidentale.
01:38 - Les pleureuses pleurent fortement par douleur et/ou pour honorer le défunt.
01:50 - Mise au tombeau.
02:47 - Comblement de la fosse.
02:55 - Les femmes allument des bâtonnets d’encens.
03:48 - Distribution des bâtonnets d’encens et de thé.
04:03 - Photographie du défunt.
04:30 - Prières bouddhiques chantées avec cicumambulation antihoraire autour de la tombe.